Les romans étrangers de l'année 2019

Les romans étrangers de l'année 2019

10 décembre 2019

C’est une sélection toute féminine que nous vous proposons cette année, des romans coups de cœur d’autrices des plus appréciées, parmi lesquelles se glisse une nouvelle venue, Sofia Aouine, dont le livre est une belle réussite.
 


Un texte de Carmen Bourque


 

Personne n’a peur des gens qui sourient, de Véronique Ovaldé

Une femme s’enfuit avec ses deux filles, cherchant à tourner le dos à son ancienne vie. Mais que fuit-elle? Dans ses bagages, entre les passeports et les carnets de santé, pourquoi a-t-elle pris soin de glisser une arme? Dans des chapitres alternant entre le passé et le présent, la narratrice remonte à la source de cette cavale d’une mère déterminée à protéger ses enfants. 
 

Encore une fois, Véronique Ovaldé crée des personnages si riches que chacun pourrait faire à lui seul l’objet d’un roman. Son intrigue nous happe. Tant le passé de l’héroïne que sa fuite au présent du récit nous interpellent. On veut comprendre, on veut savoir, jusqu’à ce que tous les morceaux du casse-tête se mettent en place
 

Les gratitudes, de Delphine de Vigan

 

Michka, une vieille dame, perd peu à peu la capacité d’exprimer ses pensées. Dans la résidence où elle doit se résoudre à habiter, Marie, une jeune femme qui lui doit beaucoup, et Jérôme, un orthophoniste, lui rendent visite et tentent de l’aider à traverser cette épreuve et à faire la paix avec son passé.
 

Le lectorat sera charmé par la délicatesse des mots de Delphine de Vigan, mais également ému par la souffrance que ceux-ci peuvent infliger quand ils fuient et obligent les personnes aphasiques à leur livrer bataille. Le livre met en évidence l’importance des rencontres qui peuvent changer une vie.
 

Les choses humaines, de Karine Tuil

Un couple de pouvoir, installé dans un mariage de convenance, fait face à un événement inconcevable qui vient fracasser sa vie : son fils unique est accusé de viol. Les croyances et les convictions volent en éclat. Que s’est-il passé? Où se trouve la vérité? Et qu’en est-il de cette fameuse zone grise…
 

Ce roman post-#MoiAussi raconte avec justesse le choc engendré par un viol et ses effets collatéraux. On assiste à toutes les étapes (interrogatoires, témoignages, plaidoiries, intrusion dans la vie intime) qui mèneront à un procès des plus troublants. Impossible de ne pas se sentir complètement interpellé par cette histoire déchirante.

 

Miss Islande, d’Auður Ava Ólafsdóttir


Dans les années 1960, Hekla, 21 ans, quitte sa campagne natale d’Islande pour Reykjavik afin de réaliser son rêve de devenir autrice. Malgré les embûches, rien ne saurait s’opposer à ses espoirs : ni les attraits d’un concours de beauté, ni le sexisme ambiant, ni les contraintes financières, ni même l’amour. 

 

Ce roman met habilement en opposition deux femmes dont les choix définiront l’avenir. Il donne aussi avec justesse la parole à un personnage homosexuel, Jon John, marginalisé par son époque et allié de la jeune femme dans sa conquête de liberté. Ce livre célèbre l’importance de l’amitié et de la détermination, ainsi que la puissance du rêve.
 

Rhapsodie des oubliés, de Sofia Aouine

 

Abad, 13 ans, fils d’immigrant, raconte sa vie et celle de son quartier « pourri » de Paris. Pour l’aider à survivre dans ce milieu hostile, des femmes : Batman, son premier amour, jeune fille voilée et emprisonnée; Gervaise, la tendre prostituée; Odette, la voisine qui l’initie à la culture; et Ethel, sa thérapeute à qui il finira par s’ouvrir.
 

Ce premier roman de Sofia Aouine est tout simplement époustouflant. Il est traversé par une langue à la fois argotique et littéraire. L’intérêt du lecteur ne faiblit jamais en raison du souffle du roman et des images, belles et étonnantes. Tout s’y enchaîne harmonieusement. Impossible de ne pas penser à La vie devant soi, de Romain Gary.