5 faits marquants sur Nina Simone

5 faits marquants sur Nina Simone
crédit photo : Getty Images

21 février 2023

Pianiste, chanteuse, compositrice et arrangeuse musicale, Nina Simone est incontestablement une icône de la musique soul. Voici cinq faits marquants sur cette artiste virtuose et engagée qui s’est éteinte il y a 20 ans.

 

Jeune prodige de la musique

Nina Simone, Eunice Kathleen Waymon de son vrai nom, naît le 21 février 1933 en Caroline du Nord, dans une famille afro-américaine de huit enfants. Élevée par une mère pasteure méthodiste et un père entrepreneur, surnommé le siffleur en raison de sa capacité à siffler deux tons à la fois, la jeune Eunice grandit dans un foyer où la musique est omniprésente. Elle a à peine 3 ans quand elle commence le piano et le chant, qu’elle pratique à l’église, où elle passe la majeure partie de son temps. Eunice démontre un tel talent qu’elle est rapidement repérée par Mrs Miller, une femme blanche issue de la bourgeoisie, chez qui sa mère fait le ménage pour arrondir les fins de mois. Elle offre à la jeune prodige de suivre des cours de piano avec Muriel Massinovitch, Miz Mazzy. Subjuguée à son tour par le don d’Eunice, celle qu’elle appellera « my white momma » (« ma mère blanche ») la prend sous aile pendant six années, durant lesquelles elle apprend le solfège et à se tenir sur scène. Surtout, elle découvre grâce à Miz Mazzy la musique de Jean-Sébastien Bach. 

 

De pianiste classique à artiste soul

Si Nina Simone est aujourd’hui reconnue comme une icône du jazz et de la soul, elle aspirait en réalité à autre chose. Dans son autobiographie Ne me quittez pas : mémoires, la diva raconte ceci :

« Bach m’a fait vouer ma vie à la musique. Une fois que j’ai eu assimilé sa démarche musicale, je n’ai eu qu’un désir. Mon vœu était limpide pour une enfant : devenir concertiste classique. » 

À cette époque, Miz Mazzy entreprend alors de créer le Fonds Eunice Waymon pour lui permettre de poursuivre son éducation musicale dans un pensionnat, d’où elle sortira première de sa promotion à 17 ans. Il est ensuite convenu que la virtuose étudiera au prestigieux Curtis Institute, à Philadelphie. Elle passe l’examen d'entrée, mais n’est malheureusement pas sélectionnée, un refus qu’elle attribuera toute sa vie à sa couleur de peau. Elle parvient tout de même à se payer des cours particuliers avec Vladimir Sokhaloff, professeur au Curtis Institute, qu’elle finance en se produisant dans un bar d’Atlantic City. Elle y joue du jazz, du blues et du classique, puis commence à chanter à la demande de son patron. Elle adopte le nom de scène Nina (qui signifie « petite fille » en espagnol) Simone, en référence à l'actrice française Simone Signoret, pour s’éviter les foudres de sa mère qui n'apprécie pas le type de musique qui l’occupe désormais. Soir après soir, Nina Simone fait salle comble, puis elle est repérée par un agent artistique new-yorkais. 

 

Une chanteuse révoltée

Arrivée à New York en 1958, Nina Simone enregistre Jazz As Played in an Exclusive Side Street Club, le premier album d’une discographie qui en compte une quarantaine. Au début de sa carrière, l’artiste possède un répertoire teinté de jazz, de folk, de soul, de classique et de chants africains. Un tournant s’opère au début des années 1960, quand elle commence à s’intéresser à la politique et à s’insurger contre les inégalités raciales. Elle écrit des chansons engagées, comme Mississipi Goddam en hommage au militant noir assassiné Medgar Evers et à un attentat dans une église ayant entraîné la mort de quatre enfants en Alabama.

Elle dénonce également la façon dont sont traitées les femmes afro-américaines, avec Four Women. Si elle se montre solidaire aux luttes menées par Malcom X et Martin Luther King, Nina Simone rejette leur idéologie pacifiste et n’hésite pas à prôner la violence pour encourager le peuple afro-américain à se faire entendre. Ses prises de position controversées lui feront d'ailleurs perdre une partie de son public blanc.

 

Une femme en colère

Plusieurs événements, comme le refus du Curtis Institute auquel elle s’est heurtée, ont contribué à nourrir sa colère tout au long de sa vie. Elle rejette notamment l’étiquette jazz, qu’elle juge « trop blanche », et préfère dire qu’elle joue de la musique classique noire, allant même jusqu’à refuser d’être comparée à Billie Holiday simplement parce qu’elles sont toutes les deux Noires.

« On ne m'a jamais comparée à Maria Callas, et je suis plus une diva comme elle que n'importe qui d'autre », explique Nina Simone dans une entrevue.

Elle se désole également d’avoir été contrainte de chanter pour garder son travail à l’époque où elle jouait à Atlantic City. L’artiste ne se cache pas d’avoir été une femme bafouée et volée, tant par ses agents que par son mari, ex-policier, devenu son imprésario et avec qui elle a une fille, Lisa Celeste. 

 

Une vie d’errance

Dans les années 1970, Nina Simone s’exile à La Barbade, puis au Libéria, en Suisse, aux Pays-Bas et en France. Ses apparitions sur scène se font plus rares, et son public se lasse de ses invectives et de ses frasques. Elle renoue avec le succès en 1987 quand le titre My Baby Just Cares for Me, qu’elle a enregistré en 1958, est utilisé dans une publicité pour le parfum No 5, de Chanel. Elle ne touchera malheureusement aucune redevance, parce qu’elle a vendu les droits 30 ans auparavant pour un maigre 3 000 $. Dans la foulée, l’artiste est hospitalisée de force à la suite de crises liées au trouble bipolaire. En 1993, elle offre une version vibrante de la chanson de Jacques Brel Ne me quitte pas qui la remet sous les projecteurs.

La même année, Nina Simone s’installe dans le sud de la France, où elle vivra jusqu’à ce qu’elle meurt d’un cancer du sein, le 21 avril 2003.