8 questions à Julien Leblond du projet des Pianos des villes, Pianos des champs

4 juin 2014

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Crédit: Page Facebook des Pianos Publics de Montréal

L'arrivée de l'été à Montréal rime avec le retour des pianos itinérants dans la métropole. Lancé en 2012 au coeur de l'arrondissement du Plateau Mont-Royal (au coin des rues Marie-Anne et St-Denis), le projet Pianos des villes, pianos des champs a pris de l'expansion et ne cesse de s'étendre depuis.

Jusqu'au 5 septembre, la population aura accès à ces pianos publics, tous les jours de 10 h à 20 h. Pour l'occasion, je me suis entretenue avec l'une des têtes pensantes derrière le projet, Julien Leblond. Entrevue.

Marie-Ange: Décris-nous ton rôle au sein du projet. 

Julien LeBlond: Je suis chercheur, technicien-accordeur et gardien des pianos. C'est moi qui suis en charge de la recherche des pianos. Parfois, on nous les donne. Je m'assure donc de les récupérer et de bien les accorder pour l'extérieur. Lorsque les pianos itinérants sont prêts, je les place dans la ville.

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Crédit: Page Facebook des Pianos Publics de Montréal

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Crédit: Page Facebook des Pianos Publics de Montréal

M-A: D'où viennent les pianos?

J.L:Ils viennent d'un peu partout, souvent de donations à la Ville. Parfois, ce sont des gens qui, plutôt que de se débarrasser des pianos, nous les confient afin qu'on leur donne une seconde vie. En général, ce sont toujours des pianos qui sont fonctionnels. C'est vraiment comme un système de recyclage de pianos. On leur donne une seconde chance pour le projet.

M-A: Quel est ton parcours en tant que technicien accordeur? 

J.L: En fait, j'étais pianiste à l'Université de Montréal, puis j'ai suivi des formations pour être accordeur. J'exerce le métier depuis environ une dizaine d'années. C'est la chef de la division des projets spéciaux sur le Plateau qui m'a approché. Nous avons tout de suite eu la même vision, puis ça a été simple d'amener le projet vers d'autres arrondissements car ceux-ci voyaient déjà le succès qui allait suivre. Avec peu de moyens, on a un piano dans la rue et cela crée une diversité, des rencontres entre les gens. Ça anime véritablement la vie de quartier; c'est la petite place des festivals comme on dit! (Rires).

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Crédit: Page Facebook des Pianos Publics de Montréal

M.A: Depuis combien de temps es-tu au sein de l'équipe des Pianos Publics de Montréal? 

J.L: Je suis là depuis la première année. En fait, tout a commencé en 2012 sur le Plateau avec le maire Ferrandez. On a commencé avec quatre pianos, puis j'ai fait des demandes dans les divers arrondissements. L'an passé seulement, nous nous sommes retrouvés avec vingt-deux pianos sur le territoire de Montréal. Cette année, l'objectif est d'atteindre la trentaine de pianos. Tout le monde en redemande; nous sommes même obligés de dire non par moment!

M-A: Qu'est-ce qui t'animes le plus dans ce projet?

J.L: C'est vraiment de rencontrer les gens pendant que j'accorde les pianos. Ce sont les rencontres et cette diversité que j'aime le plus. Il y a également la transformation physique des pianos. On crée une oeuvre d'art ouverte à tous. J'aime beaucoup cet aspect de réappropriation de la rue par un outil comme le piano. C'est comme un terrain de jeu artistique, car on peut construire plusieurs types de projets autour des instruments. Il y a des gens qui viennent y faire des vidéoclips et même les artistes qui, de plus en plus, se réapprorpient les pianos.

M-A: L'esthétique visuelle est justement très présente sur ces pianos qui sont souvent colorés et tape-à-l'oeil. Qui sont les artistes? 

J.L: La plupart du temps ce sont des artistes locaux qui sont recommandés par les arrondissements. Que ce soit un graffiteur, ou des artistes affiliés à d'autres artistes. Cette année, le Parc Lhasa-de-Sela a été inauguré, en plus d'inaugurer la saison des pianos. L'artiste qui a peint le piano était un artiste du coin, qui connaissait personnellement Lhasa de Sela. D'autres fois, ce sont les partenaires qui trouvent l'artiste dont ils ont envie de voir le travail sur le piano. C'est toujours un choix de l'artiste visuel en fonction du piano. C'est très spécifique. C'est intéressant car ça crée également une visibilité à ces artistes.

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Crédit: Page Facebook des Pianos Publics de Montréal

M-A: Comment détermines-tu l'emplacement des pianos?

J.L: C'est toujours des décisions stratégiques, qui sont prises en fonction de l'arrondissement. On essaie de choisir un parc ou une rue qui sera apte à recevoir un piano et d'animer cet espace-là. Souvent c'est l'arrondissement lui-même qui va nous suggérer des lieux. Le but c'est d'arrêter les gens dans leur quotidien, alors qu'ils attendent l'autobus ou se dirigent vers le métro, par exemple. Souvent, ce sont ces endroits que l'on essaie de cibler, pour créer un engouement auprès des gens dans des lieux spécifiques.

M-A: Considères-tu qu'il devrait avoir plus d'initiatives du genre dans les villes en général? 

J.L: Oui définitivement. Ça crée un sentiment d'appartenance dans les arrondissements. Il y a souvent des thématiques qui se créent, comme dans l'arrondissement du Sud-Ouest où c'est plus jazz. Il y a une effervescence qui se crée également entre les commerçants et les bars. C'est intéressant, car souvent ça anime des endroits où il n'y avait aucune activité auparavant. Les gens ont besoin de se réapproprier les rues, à mon avis. Présentement, il y a un engouement, même au niveau mondial. Cette année à Québec, il y aura un piano itinérant à côté d'une église. J'essaie également d'exporter le projet dans les villages, dans les Îles-de-la-Madeleine peut-être.

Vidéo de l'inauguration du parc Lhasa-de-Sela, le 15 mai dernier. Le premier piano du Plateau (peint par l'artiste Thibaud De Corta) y a été inauguré lors d'un spectacle-hommage à la défunte chanteuse.