Les albums d'ici qu'on a écoutés en boucle

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La musique nous accompagne partout où l’on va, et cette année qui s'achève nous a encore réservé son lot de merveilles canadiennes et québécoises. Voici des albums qui nous habiteront pour le reste de nos jours.

Aliocha : Eleven Songs (Audiogram)

Non seulement le deuxième plus jeune de la fratrie Schneider sait jouer, mais il chante et écrit des chansons. On avait inlassablement écouté son EP l’an passé; cette année, on ne se passe plus de son premier album complet. Son émouvant folk-rock, qui ancre ses racines dans les années 60, laisse transparaître ses influences à la Bob Dylan et Simon and Garfunkel. La musique coule dans ses veines, et ça s’entend. Merci au mentor Jean Leloup de lui avoir donné confiance en ses compos.

Prêtez l’oreille : As Good as You

Aliocha_Eleven Songs

Alvvays : Antisocialites (Royal Mountain Records)

La dream-pop du quintette originaire des maritimes et installé à Toronto a illuminé notre automne et ce début d’hiver. Pop-indie entraînante, lo-fi, guitares rock, grunge, sales, un brin psychédéliques : Alvvays embrasse une esthétique délicieusement rétro. On rêve éveillés aux plages californiennes, envoûtés par la voix claire et vaporeuse de Molly Rankin. Un opus aussi jouissif que le premier, éponyme, sélectionné sur la courte liste du prix de musique Polaris en 2015.

Prêtez l’oreille : In Undertow

Alvvays_Antisocialites

Maude Audet : Comme une odeur de déclin (Grosse Boîte)

Elle nous avait conquis avec son deuxième album, Nous sommes le feu (2015). Avec ce dernier-né, elle laisse remarquablement sa marque dans notre paysage musical. Sa voix apaisante se conjugue si bien à ses ambiances folk-alternatives signature, qui trahissent ses influences grunge et rock premières. Et que dire des collaborateurs de calibre figurant au livret : Ariane Moffatt à la réalisation, Marie-Pierre Arthur, Joe Grass et Antoine Corriveau, notamment.

Prêtez l’oreille : Gallaway Road

Maude Audet_Comme une odeur de déclin

The Arcade Fire : Everything Now

Le disque le plus pop du groupe culte — et cette synthpop lui sied. Comme toujours, la formation excelle dans les arrangements vastes, rigoureux et surprenants. Au gré de ses cinq albums longs, elle a prouvé son amour de l’exploration sonore. Elle se réinvente, et on la suit. Ne vous laissez pas rebuter par l’influence disco « abbaesque » franche de la chanson-titre; l’ensemble n’est nullement Euro-disco, mais bien pop, truffé d’élans éclectiques : funk, électro, punk…

Prêtez l’oreille : We Don’t Deserve Love

The Arcade Fire_Everything Now

Philippe B : La grande nuit vidéo (Bonsound)

Quel titre poétique! Et ce cinquième long jeu de Philippe B — nommé sur la longue liste du Polaris 2017 — le porte brillamment. Ses chansons pop classiques s’écoutent réellement comme de micro bandes sonores de films, alors que leur minimalisme se pare de magnifiques envolées orchestrales de cordes et d’instruments à vent. Autre ingénieuse idée : Laurence Lafond-Beaulne, qui donne la réplique à l’auteur de sa voix cristalline sur quelques pièces.

Prêtez l’oreille : Explosion

Philippe B_La grande nuit vidéo

The Barr Brothers : Queens of the Breakers (Secret City Records)

Le trio, composé des frères Brad et Andrew Barr, originaires du Rhode Island, et de Sarah Pagé, nous revient avec cet enivrant troisième opus, qui succède à Sleeping Operator (2014). Passionnés de folk et de blues, vous serez émerveillés par ses guitares acoustiques ou électriques valsant avec la harpe. En une écoute, on sait que cet album nous habitera longtemps, voire à pérennité. Du grand folk-rock, toujours aussi viscéralement porté par la douce voix de Brad.

Prêtez l’oreille : Song That I Heard

The Barr Brothers_Queens of the Breakers

Beyries : Landing (Bonsound)

On est tombés follement amoureux de la voix chaude et grave, et des mélodies folk enveloppantes d’Amélie Beyries — prononcé Bérice. C’est sa (double) lutte contre le cancer du sein qui a mené la compositrice et musicienne autodidacte à miser sur la musique. Cathartique, celle-ci est tout ce qu’il y a de plus organique. En entendant les maquettes de ces chansons qui vont droit au cœur, le réputé Alex McMahon s’est lancé tête première dans le projet. On le comprend! On sait d’ores et déjà que la chanteuse est là pour rester.

Prêtez l’oreille : Alone

Beyries_Landing

Philippe Brach : Le silence des troupeaux (Spectra Musique)

Juste au cas, oui, c’était bel et bien un canular, cette vidéo promotionnelle avec de prétendus collaborateurs; l’album n’a rien à voir avec cette ballade folk prémâchée conçue pour le plus grand nombre. On retrouve avec bonheur la fougue et l’irrévérence de Brach sur ce troisième disque, réalisé par Jesse Mac Cormack, qui fait dignement suite à Portraits de famine (2015). Vive le rock éclaté de Brach, qui n’hésite pas à y aller d’instrumentation inusitée pour représenter ses propos.

Prêtez l’oreille : La fin du monde

Philippe Brach_Le silence des agneaux

Coco Méliès : The Riddle (Audiogram)

Quelle rencontre fructueuse que celle de Francesca Como et de David Méliès lors d’une soirée open mic dans le Sud-Ouest de Montréal. Le folk-pop raffiné aux relents americana du tandem lui a valu cette année le prix Groupe Vocal aux Canadian Folk Music Awards. On découvrait ses lumineuses mélodies en 2014 sur Lighthouse, son premier album complet, et on les retrouve sur ce deuxième, marquées d’envolées rassembleuses.

Prêtez l’oreille : Scarce Parade

Coco Méliès_The Riddle

Collectif : Desjardins (117 Records)

Quatorze artistes, descendants de Desjardins, qu’on adore et qui chantent leur admiration de ce monument tout en conservant un son qui leur est propre. Comme l’a affirmé un amoureux du poète abitibien, « ce n’est pas un album qu’on écoute, c’est un album qu’on pleure » — devant tant de beauté brute. Si vous n’êtes pas familier avec son œuvre, voilà une porte d’entrée en or, qui nous a autant enchantés qu’elle a enchanté Desjardins lui-même. Un vibrant et bouleversant hommage à ce géant discret.

Prêtez l’oreille : Quand j’aime une fois, j’aime pour toujoursinterprétée par Saratoga

Desjardins_Collectif

Feist : Pleasure (Universal)

La Torontoise a pris son temps depuis Metals (2011), a laissé macérer sa créativité pour nous dévoiler, de nouveau, une perle folk-indie, genre dont l’autrice-compositrice-interprète est assurément une reine. On écoute cet album lent sans distraction pour mieux en savourer les plaisirs, comme ces riffs de guitare crus, grinçants, et ces moments d’explosion rock, ce sax inattendu. La chanteuse à la voix éthérée nous propose un opus inventif, introspectif, qu’on déguste sans modération. Une célébration farouche à nos oreilles, qui s’est hissée sur la courte liste du Polaris.

Prêtez l’oreille : Century avec Jarvis Cocker

Feist_Pleasure

Geoffroy : Coastline (Bonsound)

Geoffroy, nommé sur la longue liste du Polaris avec ce premier long jeu, est avide d’évasion et de liberté. Sa musique le reflète… et on le ressent. Sa voix sensuelle et ténébreuse se couche sur une pop électro planante teintée de trip-hop et de downtempo, qui nous fait voyager en terres éloignées. S’y mêlent intensément percussions, guitares, synthés et instruments à vent. On l’a écouté, sous le charme, tout le printemps en espérant que la chaleur se ramène plus rapidement.

Prêtez l’oreille : Sleeping on My Own

Geoffroy_Coastline

Pierre Lapointe : La science du cœur (Audiogram)

Un opus de Pierre Lapointe, c’est une véritable œuvre d’art sans concession, aussi cérébrale que subjuguante. Après 17 ans de carrière, sa plume est toujours aussi aboutie et ahurissante de maestria. Les orchestrations fastueuses côtoient ici tant des chansons piano-voix dépouillées que quelques exercices de style. On aime s’émouvoir en l’écoutant chanter le rapport aux autres et les relations amoureuses. On plonge dans la densité de ces pièces, captivés par leur splendeur.

Prêtez l’oreille : Sais-tu vraiment qui tu es

Pierre Lapointe_La science du cœur

Peter Peter : Noir éden (Audiogram)

Les rythmes irrésistibles du successeur d’Une version améliorée de la tristesse (2012) nous traversent le corps, nous entraînant dans l’univers onirique de l’artiste créé durant son exil à Paris (où il a finalement installé ses pénates). Son électro-pop (ou chanson électronique, telle qu’il la qualifie) aux claviers omniprésents et aux sonorités résolument françaises fait revivre les années 80. Une pop accrocheuse et évanescente absolument délectable en harmonie avec sa voix aiguë langoureuse.

Prêtez l’oreille : Noir Éden

Peter Peter_Noir éden

Émile Proulx-Cloutier : Marée haute (La Tribu)

On l’affirme sans sourciller : Émile Proulx-Cloutier est un virtuose. Comédien, scénariste, documentariste, metteur en scène, musicien et, depuis son premier disque Aimer les monstres (2013), auteur-compositeur-interprète. Son talent nous happe à nouveau de plein fouet avec le tour de force qu’est ce grandiose et superbe disque. La liberté accrue qu’il s’est octroyée a donné naissance à d’impressionnantes orchestrations et à des paroles le révélant plus intimement.

Prêtez l’oreille : Les murs et la mer

Émile Proulx-Cloutier_Marée haute

Samuele : Les filles sages vont au paradis, les autres vont où elles veulent (InTempo Musique)

Le manifeste féministe Égalité de papier inaugure ce deuxième album long. C’est sans ambages que la multi-instrumentiste Samuele Mandeville, dont l’égalité de genre est au cœur des réflexions, nous offre ses chansons aussi revendicatrices que voluptueuses. Son folk-rock aux accents blues, parfois abrasif, s’assortit de tendres mélodies où elle chante l’amour et la concupiscence, la voix chargée d’émotion. Elle s’abandonne, complètement décomplexée. C’est vivifiant. Et quelle bête de scène!

Prêtez l’oreille : La révolte

Samuele_Les filles sages vont au paradis, les autres vont où elles veulent

Tire le coyote : Désherbage (La Tribu)

Après Panorama (2015), Tire le coyote — Benoit Pinette à la ville — nous offre un quatrième disque complet sur lequel il s’écarte des talles folk-country pour s’établir en territoire folk-rock. Les guitares électriques se font plus mordantes; on se régale des nombreux solos qui parsèment cette merveille d’opus. Et on reste encore soufflés devant la finesse de sa poésie, et ensorcelés par sa poignante voix de falsetto. Une autre œuvre puissante de sensibilité.

Prêtez l’oreille : Le ciel est backorder

Tire le coyote_Désherbage

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Et vous, quel album d'ici a tourné en boucle dans vos oreilles en 2017?

Rédigé par Caroline Bertrand

Pour découvrir ce qui s’est passé dans le domaine culturel au cours de la dernière année, consultez notre rétrospective culturelle chaque jour jusqu’au 26 décembre.