Série insolite – De l’art public surprenant
Claire-Marine Beha
9 juin 2023
Au retour de l’été, quel plaisir de croiser des œuvres d’art à l’extérieur! Ces sculptures, murales et installations artistiques en tout genre viennent animer et embellir les espaces publics. Certaines peuvent également nous surprendre, se trouver dans des lieux inattendus, voire provoquer quelques discussions. Voici plusieurs œuvres d’art public étonnantes.
La fresque Beyond Walls, de Saype
Crédit : Saype.
En ce mois de juin, une murale monumentale éphémère est venue égayer le mont Royal. À l’occasion du festival Mural de 2023, l’artiste français Saype a réalisé cette œuvre de grand format à l’aide de peinture biodégradable afin de ne pas polluer le sol. Ce n’est donc que pour quelques jours que les Montréalaises et Montréalais ont pu admirer ces deux bras qui se serrent, un symbole d’espoir et d’entraide que le muraliste dessine aux quatre coins du monde. Avant de s’arrêter dans la métropole québécoise, il a eu l’occasion de créer d’autres fresques géantes engagées pour la solidarité sur la plage de Rio de Janeiro, devant le parlement irlandais ou encore à Nagasaki, au Japon.
L’installation Quand mon père est mort, c’était comme si une bibliothèque entière avait brûlé, de Susanna Hesselberg
Crédit : Stéphane Bourgeois.
Oui, vous avez bien vu, une bibliothèque souterraine semble plonger tout droit dans les profondeurs de la terre! Présentée à Québec en 2022, à l’occasion du festival d’art public Passages insolites, qui surprend les passants depuis 10 ans, cette installation a de quoi étonner. Impossible de déceler la nature de cette pièce de loin; il faut s’en approcher pour admirer tous les livres qui constituent ce puits littéraire. Le gouffre surréaliste de l’artiste suédoise Susanna Hesselberg fait écho à la thématique du deuil et à la peine abyssale qui l’accompagne. Protégée par un panneau de verre, cette bibliothèque est à jamais inaccessible. Seule la contemplation s’offre au public… Poétique et vertigineux!
L'œuvre Mythe et évidence, de Mathieu Valade
Crédit : Stéphane Bourgeois.
Également présentée l’an passé lors de l’événement Passages insolites, cette œuvre éthérée créée par le Québécois Mathieu Valade permet d'ajouter un peu de rêve à la réalité et détonne avec l’environnement asphalté dans lequel elle se trouve. Dans une vitrine, à travers une surface opaque qui semble embrumée, une licorne est à la fois exposée et dissimulée. Il semble que son apparition relève plus de l’onirisme que du réel tant la structure de l'œuvre joue avec notre perception. Difficile de détourner le regard de cet animal imaginaire fascinant au milieu de l’espace public!
Avis aux adeptes d’art public, Passages insolites prendra à nouveau d’assaut les rues de Québec, du 22 juin au 9 octobre 2023.
L'Arc de triomphe, empaqueté, de Christo and Jeanne-Claude
Crédits : Wolfgang Volz + Siegfried Modola/Getty Images
Étrange et saisissante, cette œuvre publique d’envergure aura fait couler beaucoup d’encre lors de son installation sur l’un des monuments les plus célèbres de Paris : l’Arc de triomphe. En 2021, pendant environ deux semaines, le duo d'artistes Christo et Jeanne-Claude ont emballé l’infrastructure située sur les Champs-Élysées avec du tissu pour la transformer en œuvre d’art temporaire. Les réactions n’ont pas tardé à pleuvoir, et plusieurs ont critiqué le prix de l’intervention artistique, qui s’est chiffré à 14 millions d'euros. Cet « empaquetage » était en fait un hommage posthume à Christo, mort quelques mois auparavant, qui rêvait de se servir du monument phare pour concevoir une œuvre publique déroutante. C’est une mission accomplie! Polarisante, l'œuvre est considérée par certaines personnes comme une folie posthume exorbitante, alors que d’autres apprécient son effet sensoriel spectaculaire dans un contexte où tout le monde a accès à l’art.
L’étonnant escalier Diminish and Ascend, de David McCracken
Crédit : Cameron Spencer/Getty Images. La sculpture sur la plage Bondi, à Sydney, en 2013.
Voici une sculpture qui parvient à provoquer un effet grandiose, quoiqu’un peu épeurant. Cet escalier en aluminium intitulé Diminish and Ascend, de David McCracken, provoque une illusion d’optique donnant l’impression qu’il se rend jusqu’au ciel. D’abord inaugurée en 2013 sur la plage Bondi de Sydney, en Australie, l'œuvre d’art est désormais installée de façon permanente en Nouvelle-Zélande, le pays natal du sculpteur, dans le jardin botanique de Christchurch. En jouant avec la perspective, l’artiste désire générer la sensation de pouvoir grimper et rapetisser dans le ciel. Cette sculpture, qui paraît infinie lorsqu’on se place en face de ses marches, possédait une extrémité pointue qui a malheureusement blessé et tué quelques oiseaux avant d’être remplacée par du silicone.
Le collage géant Kikito et les douaniers, de JR
Depuis plusieurs années, l’artiste JR multiplie les collages géants éphémères et est devenu une référence en matière d’art urbain. La plupart du temps, il crée ses installations photographiques monumentales in situ. Sa série Giants et notamment l’installation Kikito et les douaniers, réalisée en 2017 à la frontière entre le Mexique et les États-Unis, est particulièrement percutante. Sur des échafaudages, JR a collé le portrait gigantesque d’un jeune garçon qui semble observer le côté américain de la barricade. Cette création était accompagnée d’un pique-nique de part et d’autre de la frontière et visait à porter l’attention du public sur la crise migratoire qui touche la population de l’Amérique latine, et notamment les nombreux Mexicains et Mexicaines dont le rêve est de traverser cette délimitation géographique. Si l'œuvre a depuis été démantelée, les images ont été très partagées sur les réseaux sociaux.
Les tissages singuliers de Janet Echelman
Réputée pour ses structures aériennes colorées et attractives, Janet Echelman conçoit des œuvres qui font converger design urbain, sculpture et architecture. Ses toiles, suspendues dans plusieurs villes du monde, ont également eu l’occasion d’émerveiller la foule montréalaise lorsque le Quartier des spectacles en avait accroché une au-dessus de la place Émilie-Gamelin durant l’été 2015. En mouvement perpétuel à cause du vent, les solides fibres qui donnent vie à ce filet intriguant sont plus solides que du fer, malgré leur apparente légèreté. Des jeux de lumière viennent davantage activer la complexité des œuvres flottantes de l’artiste.
À bientôt pour un autre billet de la série insolite!