« On ne parle pas de politique! » (Mais on en regarde à la télé)

« On ne parle pas de politique! » (Mais on en regarde à la télé)
Radio-Canada/BBC

5 octobre 2022

« On ne parle pas de politique, OK? »

C’est une phrase qui fuse de part et d’autre dans nos différents milieux, que ce soit au travail, en famille ou parfois même dans notre cercle amical. On a bien beau faire notre « gros possible », comme la classe politique en temps de pandémie, mais comme tout est politique, c’est partout, et la télé n’y échappe pas. 

 

On a l’embarras du choix lorsqu’il s’agit de téléséries politiques. Certaines d’entre elles, les plus biographiques et historiques du lot, nous dressent des portraits humains de personnages parfois grandioses, polarisants et plus grands que nature. Elles nous donnent à voir que derrière la politique, il y a des êtres humains… On vous entend tomber de vos chaises d’ici. C’est souvent dur à croire, on vous l’accorde. Les séries qui sont davantage dans la fiction, elles, se permettent un point de vue peut-être plus critique et militant, ainsi que plus humoristique et cynique sur le sujet. 

Au terme de cette excitante campagne électorale, pourquoi ne pas prolonger le plaisir en faisant le plein de télévision politique et nostalgique? (C’est précis, mais ça en vaut la peine, promis!) 

Voici donc quelques petites suggestions pour se muscler le politique jusqu’aux prochaines élections... car elles arrivent toujours plus vite qu’on ne le pense, ces petites taquines. 

 

Duplessis, la minisérie

Maurice Duplessis joué par Jean Lapointe.
Maurice Duplessis interprété par Jean Lapointe./Crédit : Société Radio-Canada


Vous souvenez-vous de cette minisérie scénarisée par Denys Arcand? Bon, d’accord, elle a été diffusée en 1978, alors peut-être que peu de gens s’en souviennent. Peu importe! Elle mérite qu’on s’y intéresse aujourd’hui. 

Avant d’aller plus loin, il importe de préciser que cette chronique n’est pas une tentative de réhabiliter Duplessis. Si l’on devait la qualifier, la rédactrice serait plus woke que duplessiste.

Dans cette série, Jean Lapointe nous offre un Duplessis à la fois vulnérable et inattaquable, qui réussit étonnamment à susciter l’empathie de l’auditoire. On y relève le défi de dresser un portrait complexe de l’homme politique derrière des mesures autoritaristes, comme la loi du cadenas, des tragédies, comme l’histoire des orphelins de Duplessis, et des positions réactionnaires, telles que son opposition au suffrage féminin et au système de santé publique.

Maurice Duplessis fasciné par un grille-pain.
Maurice Duplessis impressionné par un grille-pain./Photo : Société Radio-Canada
 

On vous recommande chaudement cette série historique et biographique, que ce soit pour la justesse du jeu de Jean Lapointe ou pour de petits bijoux, comme de voir Maurice Duplessis être fasciné par un grille-pain ou de l’entendre s’exclamer en urinant : « Vous ne pouvez pas savoir ce que ça soulage de pisser sur la frontière du Labrador! » 

 

René Lévesque et René Lévesque : le destin d’un chef, les miniséries

Le Parti québécois
Le Parti québécois mené par René Lévesque./Photo : Ciné Télé Action et Société Radio-Canada


Un savoureux mélange d’histoire, de politique et d’incarnations saisissantes, le tout baignant dans une sauce un peu kitsch bien classique de la télé des années 2000 : c’est ça, René Lévesque. La suite, René Lévesque : le destin d’un chef, est moins teintée de ce charmant côté kitsch, mais elle a d’autres belles qualités! Le rythme y est plus rapide et la construction des épisodes y est mieux ficelée. Un élément franchement intéressant demeure : la présence d’archives télévisuelles dans les épisodes. Elles y sont merveilleusement bien intégrées.

Ici aussi, on serait passibles d’un emprisonnement à perpétuité si on ne soulignait pas la qualité remarquable de l’interprétation des comédiennes et des comédiens. Emmanuel Bilodeau nous livre le René Lévesque de nos souvenirs. Aussi, le plaisir est grand à voir Pierre Elliott Trudeau (Pierre Gendron), Jacques Parizeau (Patrice Godin, puis Germain Houde) ou encore Lise Payette (Dominique Pétin) renaître sous nos yeux, qu’on soit souverainistes, fédéralistes ou aucune de ces réponses.

Lise Payette jouée par Dominique Pétin.
Lise Payette jouée par Dominique Pétin./Photo : Ciné Télé Action et Société Radio-Canada

 

House of Cards, la minisérie britannique

La distribution de la série originale House of Cards.
La distribution de la version originale de House of Cards./Photo : BBC


Petite saucette de l’autre côté de l’océan pour cette dernière suggestion, une série écrite par un conseiller de Margaret Thatcher. Ça teinte, n’est-ce pas? La version britannique de House of Cards est un drame avec quelques traits de comédie à propos de la cruauté et de la corruption en politique. En prime, ça pue la télé des années 90. Ce n’est tout de même pas rien!

On ne passera pas par quatre chemins : le protagoniste, Francis Urquhart (Ian Richardson) est un monstre. C’est l’idée même du génie politique machiavélique. On le voit commettre les pires atrocités, mais on est coupables de tomber sous son charme. Ce n’est pas sans nous rappeler la vraie vie. 

« You might very well think that; I couldn't possibly comment », qu’on pourrait traduire librement sans avoir l’ombre d’un diplôme en traduction par « Vous avez le droit de le penser; je préfère m’abstenir de commenter ». 

C’est la ligne du personnage, une confirmation sans jamais en être une. C’est une image de sa propre hypocrisie, mais aussi du jeu de la politique.

Bon! Avec ces suggestions, vous devriez être prêts et prêtes, ou presque, pour les prochaines élections. Ajoutez peut-être plusieurs heures de lecture, de bulletins de nouvelles, de discussions, de réflexions et de remises en question, et ça devrait aller! 

Francis Urquart dans House of Cards.
Le personnage de Francis Urquart dans la série britannique House of Cards./Photo : BBC