Un trio d’albums à découvrir

Un trio d’albums à découvrir
Larynx (crédit photo : Bonbonbon) et Lucill (crédit photo : William Gagné)

25 avril 2022

La scène musicale d’ici foisonne de nouveautés d'artistes tant en émergence que de renom. Nous vous proposons un trio d’albums récemment sortis que l’on a adoptés. Se fraieront-ils un chemin jusqu’à vos oreilles?

 

Snake Eyes, de Lucill  (Coyote Records)

L’indie pop et rock de Lucill aux relents folk nous fait de nouveau planer sur ce deuxième album, après Bunny, paru en 2020. L’auteur-compositeur-interprète Raphaël Bussières, de son véritable nom, fait de nouveau preuve d’un sens viscéral et affûté de la mélodie, embrassant les refrains accrocheurs et, surtout, enivrants. Depuis son premier microalbum homonyme (2018), qui lui a valu le prix du microalbum indie rock de l’année au Gala alternatif de la musique indépendante du Québec (GAMIQ), le guitariste et bassiste de longue date portant également la casquette de producteur n’a cessé de nous faire vivre des moments d’ivresse musicale grâce à ses ambiances atmosphériques et lumineuses, sur lesquelles se pose sa voix susurrante, au petit quelque chose de langoureux et désinvolte à la Kurt Vile. Parlons des guitares – charnelles, enveloppantes –, qui occupent une place de choix dans les compositions à fleur de peau de Lucill. Sur Snake Eyes, celui que l’on a aussi connu dans le groupe Heat a insufflé une essence countryesque à certaines pièces – pensons à la guitare à pédale magnifiant l’irrésistible Baisser les yeux ou aux Routes obligées, qui ferait belle figure dans le répertoire de Jean Leloup. À nos oreilles, les riffs des mélodies soyeuses de Lucill sont dignes des grands noms du rock doux des années 1990 et montrent ce que le genre a de meilleur à offrir – notamment sur les chansons Et tout s’effondre, L’inconnu, Détours

 

Sans oublier, de Lysandre (Chivi Chivi)

C’est tout en délicatesse que groove la pop indé satinée de Lysandre. Ce magnifique premier album de la pianiste aguerrie (qui joue depuis la petite enfance et est passée par de prestigieuses écoles de musique) brille d’une lueur mordorée, portée par sa voix d’or et des arrangements fins puisant dans les années 1970. La fresque de la pochette reflète la dose d’amour que transmet Lysandre Ménard à la gent féminine sur cet album, hymne à la sororité. Celle qui évolue depuis longtemps sur la scène musicale en tant qu’accompagnatrice et membre de nombreux groupes (Klô Pelgag, The Loodies, Girl Ray, Ping Pong Go) rend en effet hommage aux femmes qui l’émeuvent et l’inspirent (dont sa grand-mère, Marie Uguay et Silvia Plath) – à ce chapitre, entendre Lysandre et ses sœurs de cœur Ariane Roy, Lou-Adriane Cassidy et N Nao chanter en chœur que « toutes les femmes sont des reines, et le temps portera leur peine » sur Tintagel (inspirée de Tristan et Iseut) est pur ravissement. Tout comme l’influence rétrofuturiste de La pointe du monde, les somptueuses orchestrations de L’explosion ou l’envoûtante Löwe. Lysandre, qui est également comédienne (en lice au Gala Québec Cinéma pour La passion d’Augustine), avait fait paraître un premier microalbum, Maison-Dieu, en 2020.

 

Applaudissez, bande de chameaux, de Larynx (Bonbonbon)

D’abord, le titre. Puis, en guise de préambule, Alexandre Larin, alias Larynx, murmurant : « OK, l’album, il commence dans pas très long… » Y aura-t-il du badinage dans l’air? Certes, avec sa prose, irrévérencieuse à ses heures, il ne se prend pas au sérieux. Or, à l’instar des Trois Accords, cette proposition plus excentrique n’empêche en rien la richesse mélodique. Le créateur fantaisiste à la voix légèrement nasillarde nous entraîne dans diverses sphères rock s’alliant harmonieusement : psychédélisme des années 1970 ou 1990, virée countryesque, touche new-wave, rock britannique des années 60… C’est sans surprise que nous avons lu que Frank Zappa et Chocolat, plus près de chez nous, l’avaient inspiré. Amateurs et amatrices de Jonathan Personne, de Corridor, de Malajube, de Xavier Caféine ou de Jimmy Hunt (le claviériste et saxophoniste Christophe Lamarche-Ledoux, l’une des têtes pensantes de Maladie d’amour, collabore justement à quelques morceaux) affectionneront probablement la dégaine ainsi que les arrangements déjantés et vaporeux de cet artiste, que Les Deuxluxes (qui participent à la chanson Tu as tellement changé) ont qualifié sur Instagram de « crazy dude fabuleux » dont ils ne pourront plus jamais se passer. Nous joignons allègrement notre voix aux leurs : chameau ou non, nous applaudissons cet album costaud de 17 morceaux!