La Saison de la lecture de Montréal selon Biz

2 octobre 2015

Du 24 septembre au 30 novembre, la métropole célèbre la lecture! Plus de vingt partenaires se regroupent encore une fois cette année pour la quatrième édition de la Saison de la lecture de Montréal, un événement qui promeut la lecture sous toutes ses formes.

Afin d'en apprendre plus sur cette grande célébration littéraire, nous nous sommes entretenu avec Biz, le porte-parole de l’événement. Membre de la formation hip-hop Loco Locass, il est aussi un auteur reconnu ayant publié trois romans chez Leméac (Dérives (2010), La chute de Sparte (2011) et Mort-terrain (2014)). L'hiver prochain, il publiera Naufrage, son quatrième roman.

2015 Lancement - Saison de la lecturephoto: Michel Pinault

Qu’est-ce que la saison de la lecture de Montréal?

Il s'agit d'une sorte de constellation d'événements culturels autour de la lecture et de l'alphabétisation qui a lieu du 24 septembre au 30 novembre. Ça met en scène des événements comme le Festival international de la littérature, le Salon du livre , des remises de prix littéraires, mais aussi plusieurs activités gratuites ou peu dispendieuses dans les bibliothèques et les écoles. J'en suis le porte-parole, c'est-à-dire que je porte la parole et que je répands la bonne nouvelle!

Pourquoi as-tu choisi d’en être le porte-parole?

Ils me l'ont demandé et je ne pouvais pas dire non puisque la lecture et l'écriture sont au cœur de ma vie depuis que je sais lire! Aussi, au Québec, près de la moitié de la population est considéré comme analphabète fonctionnelle ce qui est absolument sidérant dans une soi-disant société du savoir. Tu entends nos politiciens parler du Québec, et puis tu regardes ce qui se passe dans les faits et ils ne semblent pas vivre dans la même réalité que nous. On coupe allègrement dans l'éducation alors que les gens ne savent même pas lire! J'ai toujours placé la lecture au cœur de deux choses dans la vie d'une personne : le pouvoir et le plaisir. Le pouvoir parce que la lecture te permet, en tant que citoyen, d'avoir accès au savoir sans intermédiaire. Moi, je crois que tu ne peux pas exercer pleinement ton pouvoir citoyen si tu n'es pas capable de lire ni d'analyser ce que tu lis. Ensuite, le plaisir, parce qu'il n'y a rien de plus plaisant que de lire! Le soir, mes enfants me demandent toujours une histoire non pas pour apprendre des choses, mais pour avoir du plaisir.

Es-tu un grand lecteur depuis toujours? Quand est-ce que le déclic, l’amour de la lecture, s’est présenté?

La lecture occupe une place vraiment importante dans ma vie. J'ai un souvenir très vif de mon premier rapport avec la lecture, quand ma mère me lisait des histoires le soir à mon frère et à moi. On aimait beaucoup La chèvre de Monsieur Seguin et ma mère nous lisait ça pratiquement chaque soir. Un moment donné, je me suis aperçu, vers cinq ou six ans, qu'elle prenait certaines libertés dans le texte, qu'elle rajoutait des mots, en sautait certains... Et là, moi, je commençais à la surveiller et lui dire «heille, ce mot-là, tu ne l'as pas dit!» et finalement elle m'a remis le livre sur les genoux et m'a dit que maintenant j'étais capable de le lire tout seul. C'est là que j'ai compris que j'étais maintenant autonome et que dorénavant, je pouvais lire La chèvre de Monsieur Seguin cent fois dans la journée si je le voulais. Aujourd'hui, je lis beaucoup pour le travail, mais aussi pour le plaisir.

Quel conseil donnerais-tu aux parents dont les enfants n’aiment pas la lecture?

Il faut valoriser la lecture et prévoir du temps pour cette activité. Aussi, je crois qu'il ne faut pas moraliser la lecture. Si ton gars participe à un pool de hockey et qu'il lit des magazines sportifs pour connaître les statistiques des joueurs, c'est de la lecture. Même chose s'il aime les motos et qu'il lit le Guide de l'auto, ça reste de la lecture. On ne sait pas mais peut-être que le Guide de l'auto va te mener à Proust un moment donné! Peut-être pas non plus, mais c'est pas grave. Il faut lire sur des choses qui nous intéressent. C'est certain que ton enfant aime quelque chose, alors nourris sa passion par la lecture.

En tant qu’auteur, comment est-ce que la lecture influence ton écriture?

Ma lecture influence mon écriture et mon écriture influence ma lecture. Je crois pas que tu puisses écrire sans lire, parce qu'au-delà du sujet, du verbe et du complément, y'a le style. Moi, par exemple, mon écrivain préféré c'est Houellebecq et je trouve que c'est un as du point-virgule, et moi, dans mon écriture, j'ai décidé de réhabiliter le point-virgule. J'ai d'ailleurs lu qu'il était en voie de disparition, alors je veux le sauver! Comme écrivain, je travaille beaucoup mon style parce que j'écris un livre que j'aimerais lire au final.

Selon toi, quel est le plus beau compliment qu’on puisse faire à un auteur?

Premièrement, avant même de complimenter, le plus beau geste qu'un lecteur peut poser à mon endroit, c'est de lire mon livre. Qu'il prenne du temps dans la vie qu'il mène, où il a cent mille raisons de ne pas s'enfermer dans un livre comme le travail, les enfants et la vie de couple. Un livre, ça te demande du temps, donc quand un lecteur prend du temps pour me lire, ça me touche toujours. Évidemment, quand ils me disent que ça les a émus, que ça les a fait rire, ça me fait toujours plaisir et ça me permet de d'élargir ma perception de mon livre. C'est quand même magique quand tu réussis, alors que tu n'es même pas dans la même pièce, à toucher quelqu'un qui est en train de lire quelque chose que tu as écris il y a un an ou dix ans. C'est pas banal comme métier!

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Biz étant un grand lecteur, nous avons profité de son grand amour pour les livres pour lui faire passer un petit questionnaire à saveur littéraire.

 

Selon toi, quel est le meilleur livre :

- pour faire découvrir la lecture à un jeune : Harry Potter - J.K. Rowling

- quand on a le mal du pays :L'homme rapaillé - Gaston Miron

- pour se dépayser : Fondation - Isaac Asimov

- pour réfléchir : Le capital au XXIe siècle  - Thomas Piketty

- pour se divertir, rire : Plateforme - Michel Houellebecq ou n'importe quel Gaston Lagaffe!

- quand on a les blues, qu’on veut pleurer : Les enfants de Dimmuvik - Jon Atli Jonasson

- à traîner au petit coin : De la poésie!

- à faire lire au secondaire : Les fleurs du mal - Baudelaire et Cyrano de Bergerac - Edmond Rostand

- à offrir à un jeune qui débarque sur un campus universitaire : Le maître des illusions - Donna Tartt

- de tous les temps : Les particules élémentaires - Michel Houellebecq

- que tu as lu récemment : Il était une ville - Thomas B. Reverdy