Série insolite – Des œuvres engagées

Série insolite – Des œuvres engagées
Mark Lennihan/AP Photo

23 juin 2022

L’art vit dans l’œil de la personne qui l’observe. Tout un chacun peut donc donner une signification tout à fait unique à une œuvre que même l’artiste l’ayant créée n’aurait jamais soupçonnée. C’est particulièrement vrai avec l’art abstrait. Sauf que parfois, on imagine des œuvres d’art dans le but de livrer un certain message ou d’amener le public à la réflexion. C’est précisément ce qui nous a donné l’inspiration pour fouiller le web, dans le cadre de la série insolite, afin de recenser quelques créations visant à générer ce type de réaction chez les gens les observant.

Voici donc cinq œuvres engagées.
 

La fille sans peur (Fearless Girl) – New York

La statue de La fille sans peur.
Photo : Mark Lennihan/AP Photo

En mars 2017, à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, a eu lieu le dévoilement de la statue de La fille sans peur (Fearless Girl), de Kristen Visbal, placée à quelques mètres de l’imposant Taureau de Wall Street (Charging Bull) en bronze régnant sur le quartier de la finance de New York depuis 1989. L’œuvre représentant une jeune fille déterminée a vite été reconnue à travers le monde comme un symbole féministe puissant qui dénonce le sexisme ainsi que la faible proportion de travailleuses occupant des emplois dans le milieu des finances. La statue ne devait rester à son emplacement qu’une semaine, mais sa popularité a forcé la main du gouvernement municipal, qui a finalement décidé de la laisser en place jusqu’en décembre 2018. C’est à ce moment qu’elle a été déplacée devant la bourse de New York, endroit tout autant symbolique.

En avril dernier, un conseil de ville a renouvelé le permis de l’entreprise propriétaire de La fille sans peur afin que la statue demeure à son emplacement actuel pour une période supplémentaire de 11 mois. La Ville souhaiterait acquérir l’œuvre, mais un litige subsiste entre Kristen Visbal, l’artiste l’ayant créée, et State Street, la compagnie en ayant fait la commande et qui en détient toujours les droits.

 

Jésus le sans-abri (Homeless Jesus) – Montréal

En novembre 2019, Montréal est devenue l’une des dizaines de villes à accueillir la statue Jésus le sans-abri représentant l’important personnage du catholicisme couché sur un banc, abrillé sous une couverture. Son dévoilement a eu lieu le 17 novembre 2019 à l’occasion de la Journée mondiale des pauvres, moment particulièrement bien choisi puisque la sculpture a pour but de sensibiliser la population aux enjeux vécus par les personnes moins nanties de la société. L’œuvre toute de bronze réalisée par l’artiste ontarien Timothy P. Schmaltz, dont la renommée n’est plus à faire, a été installée au 463, rue Sainte-Catherine Ouest, sur le parvis de l’église unie Saint-James. Son pasteur, Arlen John Bonnar, était d’ailleurs enchanté que l’établissement ait le privilège d’accueillir la statue puisque son église a toujours eu la mission de venir en aide aux personnes dans le besoin. 

Plus de 40 villes, dont Mexico, Buenos Aires, Chicago, Madrid, Dublin et le Vatican, accueillent ou ont déjà accueilli une version de Jésus le sans-abri.
 

La Pasionaria – Bruxelles

Si vous avez visité Bruxelles depuis 2006, vous avez peut-être eu l’occasion d’observer – ou même d’essayer! – l’œuvre La Pasionaria, réalisée par Emilio Lopez-Menchero et qui a été installée à proximité du Marché du Midi. Cette sculpture en forme d’immense mégaphone permet à quiconque de faire entendre sa voix haut et fort dans les rues avoisinantes ou encore d’écouter les sons ambiants qui marquent les aléas de la vie quotidienne. L’inspiration ayant mené à la création de cette installation des plus originales est l’activiste espagnole Dolores Ibárruri, qui était une grande défenderesse de la liberté lors de la guerre civile au pays à la fin des années 1930. La courageuse femme y allait souvent de discours enflammés sur les ondes de la radio et visitait même parfois les champs de bataille pour motiver les troupes. C’est donc en son honneur que l’artiste a créé ce porte-voix géant d’une longueur de 4 mètres et d’un diamètre de 2,3 mètres, justement appelé La Pasionaria, qui était le surnom de l’activiste, afin que tout un chacun ait la possibilité de faire entendre son point de vue.

On a d’ailleurs volontairement installé l’œuvre dans un quartier habité par nombre de migrantes et migrants, qui sont malheureusement souvent laissés pour compte dans la collectivité et n’ont pas toujours l’occasion de faire connaître leur opinion.
 

Source – Montréal

L'oeuvre Source.
Photo : Charles Contant/Radio-Canada

En 2017 avait lieu le 375e anniversaire de la ville de Montréal, et à cette occasion, nombre de festivités et événements spéciaux ont été organisés. Parmi ceux-ci, il y a eu l’installation d’œuvres d’art publiques, dont la sculpture Source, imaginée par Jaume Plensa, artiste espagnol de renommée internationale. Ce dernier a créé le torse géant fait d’acier inoxydable qui se trouve à l’intersection du boulevard Robert-Bourassa et de la rue Wellington, donc à l’entrée de la métropole, en souhaitant rendre hommage aux origines de la ville. L’œuvre formée d’une multitude de lettres provenant de divers alphabets a aussi pour but de souligner la richesse de la diversité culturelle des gens ayant peuplé Montréal depuis sa fondation, en 1642. La sculpture fait aussi un clin d’œil au passé, au présent et à l’avenir de la communauté montréalaise tout en soulignant l’apport important de l’eau ainsi que des peuples autochtones dans l’histoire de la ville.

Il est particulièrement impressionnant d’observer l’immense œuvre d’art lorsque le soleil est couché, puisqu’elle est mise en valeur par les nombreuses lumières l’entourant. 
 

Oui-non – Genève

Depuis 2000, l’œuvre Oui-non, de Markus Raetz, est visible à Genève, en Suisse. L’installation est formée d’un mât métallique d’une dizaine de mètres de hauteur sur lequel sont placés trois morceaux de fer ayant des formes bien particulières. Jusque-là, rien de très intéressant, mais ce qui rend cette structure unique, c’est qu’elle joue avec la perspective puisque les trois pièces de métal placées au sommet peuvent former les mots « oui » et « non » selon l’emplacement de la personne les observant. L’artiste a ainsi voulu démontrer que toute réalité a une certaine part d’ambiguïté selon l’angle avec lequel on l’observe, que les apparences peuvent souvent être trompeuses.

Les autres œuvres de Markus Raetz jouent également avec la perspective et la vision pour créer des effets surprenants.


Voilà qui met fin à ce recensement de quelques œuvres d’art portant à la réflexion.

À bientôt pour un autre billet de la série insolite!