Ces stars qui traversent le temps
Marion Gouiry
27 mai 2015
Les beaux jours s'installent, la chaleur aussi, l'été se profile et le cycle des saisons s'accomplit, encore, et toujours. Le temps passe...
Une belle réflexion sur le temps qui passe est le dernier film d'Olivier Assayas, Sils Maria, qui met en scène Juliette Binoche dans le rôle d'une comédienne de théâtre. Adulée depuis ses vingt ans grâce au rôle d'une lolita qui séduit une femme dans la cinquantaine, un metteur en scène lui propose trente ans plus tard de jouer la même pièce... mais dans le rôle de la quinquagénaire.
Juliette Binoche a déclaré avoir attendu ce rôle avec impatience, pour se confronter à sa propre situation d'actrice venant de franchir le cap des cinquante ans. Il faut dire que l'industrie du cinéma n'est pas toujours clémente à l'endroit des actrices qui prennent de l'âge, alors que leurs confrères masculins tirent leur épingle du jeu. Deux poids, deux mesures?
Je vous emmène donc à la rencontre d'un quatuor d'actrices qui, au fil des décennies, continuent de nous éblouir, de nous charmer : Juliette Binoche, Meryl Streep, Catherine Deneuve et Helen Mirren.
Fougue et lumière intemporelles:
Juliette Binoche
Rendez-vous (André Téchiné - 1985)
Avec ce film, trio amoureux aussi intense que tragique, Juliette Binoche se révèle et remporte en 1985 le Prix Romy-Schneider, qui honore une jeune comédienne, espoir du cinéma français et francophone.
Trois couleurs: Bleu(Krzysztof Kieślowski - 1993)
Premier opus de la subjuguante trilogie du cinéaste polonais (Trois couleurs: Bleu, blanc, rouge), Bleu souffle le monde du cinéma et Juliette Binoche irradie de son jeu à fleur de peau la planète du 7e art. Nommée pour le Golden Globes de la Meilleure actrice dans un film dramatique en 1994, elle remportera cette même année le César de la Meilleure actrice.
Copie conforme (Certified copy - Abbas Kiarostami - 2010)
Une trame narrative double et à contre-sens pour révéler le jeu de séduction d'une femme pleine de désirs. Face à un homme initialement impénétrable et distant, Juliette Binoche déploie une leçon de séduction récompensée par le prix de la Meilleure interprète féminine au Festival de Cannes 2010.
Sils Maria (Olivier Assayas - 2014)
Face-à-face entre jeune femme et femme mûre, entre comédienne de théâtre et vedette de blockbusters, entre nostalgie du passé et élan vers l'avenir, ce film faisait partie de la sélection officielle du Festival de Cannes en 2014 et a valu à Juliette Binoche d'être nommée pour le prix de la meilleur actrice aux César 2014. À voir!
Force, délicatesse et profonde
humanité: Meryl Streep
Kramer contre Kramer (Kramer vs Kramer, Robert Benton - 1979)
Dans le rôle d'une épouse et d'une mère prise dans l'engrenage de la séparation, portée par la lutte pour la garde de son fils tout au long d'une bataille juridique prenante et émouvante, Meryl Streep marque les esprits et remporte son premier Oscar en tant que Meilleur second rôle féminin en 1979. Un classique!
Le Choix de Sophie (Sophie's Choice, Alan J. Pakula - 1983)
Dans ce film poignant, Meryl Streep incarne Sophie, une immigrante polonaise rescapée des camps de concentration, qui a su reconstruire sa vie tout en gardant enfoui en elle un douloureux secret. Époustouflante, Streep cumule les récompenses dont l'Oscar de la meilleure actrice et le Golden Globe de la meilleure actrice dans un film dramatique.
Sur la route de Madison (The Bridges of Madison County, Clint Eastwood - 1995)
Qui n'a pas vibré et versé des larmes devant ce film dans lequel Clint Eastwood et Meryl Streep rendent avec intensité et subtilité les émotions d'un amour impossible? Cette oeuvre a valu à l'actrice d'être nommée pour l'Oscar de la meilleure actrice et pour le Golden Globe de la meilleure actrice dans un film dramatique en 1995.
Into the woods (Robert Marshall - 2014)
Actrice aux multiples talents, Meryl Streep surprend avec sa voix dans cette adaptation filmée de la comédie musicale éponyme créée par Stephen Sondheim et James Lapine à Broadway en 1986. Une sorcière pleine de charmes!
Franc-parler et audace:
Catherine Deneuve
Les parapluies de Cherbourg (Jacques Demy - 1964)
Avec ce film, Catherine Deneuve débute sa collaboration avec Jacques Demy et devient l'un des visages emblématiques de l'univers poétique, enchanté et grave de ce réalisateur. Sa carrière est lancée en grand; le film est récompensé par la Palme d'Or au Festival de Cannes mais aussi par le Prix Louis-Delluc en 1964.
Le dernier métro (François Truffaut - 1981)
Ayant travaillé ensemble et s'étant même aimés des années auparavant, François Truffaut et Catherine Deneuve sont toujours complices lorsque, en 1981, le réalisateur propose à l'actrice un "rôle de maturité" avec Le dernier métro. Ce film, dont Catherine Deneuve déclare qu'il reste celui dont elle est la plus fière, lui vaut le César de la Meilleur actrice.
Indochine (Régis Wargnier - 1992)
En incarnant une propriétaire de plantation d'hévéas dans l'Indochine française, Catherine Deneuve est époustouflante d'intensité et de charme. Sa performance est reconnue internationalement : elle reçoit pour la seconde fois le César de la meilleure actrice, en plus d'être nommée pour l'Oscar de la meilleure actrice en 1993.
Un conte de Noël d'Arnaud Desplechin (2008)
Pour son rôle de mère attachante et détestable, Catherine Deneuve reçoit le Prix spécial du 61e Festival de Cannes ainsi que pour l'ensemble de sa carrière. Ce prix attribué par le jury présidé par Sean Penn est partagé, ex æquo, avec Clint Eastwood. À souligner, un autre rôle de mère forte qu'elle a incarné dernièrement dans L'homme que l'on aimait trop d'André Téchiné (2014).
Distinction naturelle, enthousiasme
et discrétion médiatique: Helen Mirren
Cal (Pat O'Connor - 1984)
Après s'être illustrée à l'écran « sur le tard », notamment dans le rôle de la Fée Morgane dans Excalibur de John Boorman (1981), Helen Mirren remporte le prix de la Meilleure interprétation féminine au Festival de Cannes en 1984 pour son rôle de Marcella, veuve d'un policier abattu par l'IRA, qui se lie d'amitié puis tombe éperdument amoureuse d'un jeune catholique de 19 ans.
La folie du roi Georges (Nicholas Hytner - 1995)
Dix ans ans après sa première distinction à Cannes, Helen Mirren reçoit à nouveau le prix de la Meilleure interprétation féminine, cette fois non pas en tant qu'Irlandaise mais en tant que reine d'Angleterre! La reine Charlotte, épouse du roi Georges III, confrontée à la détérioration mentale de ce dernier. Plusieurs fois nommé aux Oscars, un film à découvrir!
The Queen (Stephen Frears - 2006)
C'est sous les traits d'une autre tête couronnée, soit une Elisabeth II impavide suite au décès de Lady Diana, qu'Helen Mirren peut être sacrée officiellement reine des récompenses. Elle reçoit la Coupe Volpi pour la meilleure interprétation féminine à la 63e Mostra de Venise, en plus du Golden Globe ET de l'Oscar de la meilleure actrice. Chapeau bas!
The last station (Michael Hoffman - 2010)
Relatant les dernières années de l'écrivain Léon Tolstoï et sa relation difficile avec sa femme, ainsi que l'influence de ses proches sur lui, ce film conduit Helen Mirren - seulement quatre ans après The Queen - à remporter une nouvelle fois l'Oscar de la meilleure actrice pour son interprétation de la Comtesse Tolstoï. À quand un prochain Oscar?
Pour conclure, une senior et une junior: Judi Dench et Patricia Arquette
Pour son interprétation dans Philomena de Stephen Frears, Judi Dench était en 2014, l'année de ses 80 ans, en nomination pour l'Oscar de la meilleure actrice 2014 ,alors que Patricia Arquette a remporté en 2015 l'Oscar et le Golden Globe de la meilleure actrice dans un second rôle pour son interprétation dans Boyhood de Richard Linklater. À l'approche de la cinquantaine, cette actrice n'hésite pas à donner de la voix pour sensibiliser à l'inégalité professionnelle qui existe à Hollywood entre les acteurs et les actrices qui font face au temps qui passe. Voici une vidéo qui illustre savoureusement son propos.
Et vous, quelles sont vos étoiles hors du temps?