Les 50 printemps de La semaine verte
Josiane Aubuchon
31 mars 2021
La semaine verte a 50 ans! Quand on y pense, cette émission a littéralement traversé les époques. Elle s’est trouvé un chemin depuis votre vieille télé à antenne jusqu’à votre iPhone. Malgré tous les bouleversements qui ont transformé l’univers télévisuel, La semaine verte a conservé sa place et sa pertinence au petit écran.
Un rendez-vous réconfortant
Ce n’est pas une émission destinée aux enfants, évidemment, mais pour moi, c’est une production phare de ma jeunesse. Il faut savoir que j’ai grandi sur une ferme laitière, dans un rang de la belle région de Lanaudière et que chez nous, chaque dimanche midi, peu importe ce qu’il y avait sur la table, il fallait mettre la télé à Radio-Canada et regarder Yvon Leblanc, animateur de l’émission de 1978 à 2002, annoncer les grands enjeux agricoles du jour.
Pour l’enfant que j’étais, le lunch du dimanche était un programme totalement ennuyant. Au menu : spaghetti et crise de la vache folle, pâté chinois et pêche aux moules sous la glace, pain de viande et biodiversité des sols, etc. Bref, chaque dimanche que le bon Dieu amenait, je devais m’attabler et rester silencieuse pour que toute la famille puisse regarder attentivement La semaine verte… tout ça sans pouvoir sauter les annonces !
Puis, tranquillement, en vieillissant, sans m’en rendre compte, j’ai moi-même fini par avoir envie de me taire et d’engloutir mon grilled cheese en écoutant la sacro-sainte émission dominicale de ma famille.
Même qu’une fois rendue en appartement, regarder La semaine verte m’a procuré un certain sentiment de réconfort. C’était comme si j’étais toujours à la maison. Quand on réalise qu’entendre parler de fertilisants ou de cheptel bovin devient confortable et sécurisant, c’est là qu’on prend conscience de l’étendue du pouvoir de La semaine verte!
Une riche histoire et de solides racines
À sa création, au début des années 1970, l’émission s’adressait uniquement aux agriculteurs. La réalité agricole était alors bien différente. La preuve : à l’époque, on dénombrait près de 61 000 fermes au Québec; désormais, il n’en reste que 29 000.
Au même moment, Radio-Canada proposait déjà quelques émissions à saveur horticole et agraire. La création de La semaine verte était l’occasion parfaite de regrouper tous ces grands thèmes et d’en faire un véritable magazine agricole. C’est ainsi que l’émission est née d’une fusion entre Des travaux et des jours et Les quatre saisons. Pendant sa première année de vie, La semaine verte n’avait qu’une durée de 15 minutes; ce n’est qu’en 1972 qu’elle a adopté le format d’une heure qu’on lui connaît encore aujourd’hui.
La semaine verte s’illustre comme une émission qui a su évoluer à travers les années. Aujourd’hui, son contenu s’adresse à un large auditoire, autant urbain que rural. Les sujets sont près de l’actualité et tentent de répondre aux enjeux qui se pointent le bout du nez : on y aborde notamment les thèmes de l’alimentation, des changements climatiques, de la sauvegarde de l’environnement et de la gestion des ressources renouvelables.
Fait plutôt intéressant : malgré ses 50 ans d’existence, La semaine verte n’a eu que très peu de personnes assurant son animation, soit Pierre Perreault, Yvon Leblanc, Errol Duchaine et Catherine Mercier, qui occupe ce poste depuis 2013. La présence d’une femme à la barre de l’émission est une belle façon de moderniser l’émission, le milieu agricole ayant longtemps été associé aux hommes par le passé.
Au Canada, La semaine verte est actuellement l’émission la plus ancienne portant sur l’agriculture et l’environnement.
Une pertinence sans cesse renouvelée
La grande force de l’émission réside dans le fait qu’on s’adresse à monsieur et madame Tout-le-Monde. Grâce aux reportages qui y sont présentés, certaines personnes ont pu découvrir d’où provenait réellement le contenu de leur assiette et sont sans doute devenues des citoyennes et citoyens plus conscientisés au monde qui les entoure.Plusieurs découvertes et avancées ont été mises en lumière grâce à La semaine verte, comme l’apparition du yogourt dans les supermarchés, l’avènement de la culture de serre ou l’exploitation des ressources naturelles partout dans le monde. L’émission a toujours eu pour mission de sensibiliser son auditoire, ce qu’elle a réussi à faire au fil des ans grâce à de la vulgarisation de grande qualité. La semaine verte sait susciter la curiosité de son public et l’amener à faire des apprentissages.
D’ailleurs, avec la crise sanitaire actuelle, plusieurs personnes ont été sensibilisées à l’importance d’encourager les agricultrices et agriculteurs locaux, tandis que d’autres ont décidé d’aller s’établir en campagne ou, même, ont pris la clé des champs pour aller prêter main-forte aux productrices et producteurs d’ici. Plus que jamais, à une ère où l’on discute davantage d’autosuffisance et où les gens en ville veulent de plus en plus avoir un jardin urbain, une émission comme La semaine verte est extrêmement pertinente.
Un plaidoyer pour 50 autres années
Unique à travers une tonne de téléromans, de talk-shows et de téléréalités, La semaine verte mérite un peu plus d’attention. Mettez de côté vos appréhensions d’émission plate pour les agronomes : les sujets sont toujours très intéressants, en plus d’être accompagnés de sublimes images. Tant qu’à vivre sur terre, aussi bien prendre 60 minutes par semaine pour prendre des nouvelles du milieu où l’on habite.
Plus que jamais, les gens du monde entier prennent conscience de l’importance d’avoir une planète en santé. Tranquillement, on sent un retour aux sources, une nouvelle glorification des valeurs de la terre. Si on veut s’offrir un futur rayonnant, il faut s’instruire. Regarder La semaine verte, c’est commencer à cheminer vers un nouveau mode de vie; c’est se donner des outils pour changer ses façons de consommer, de voyager et de cultiver.
La semaine verte, c’est la force silencieuse de la programmation télé. On en parle peu au bureau, autour de la machine à café et pourtant, l’émission rallie bien des publics. Sa qualité n’est plus à défendre. C’est un peu comme si l’émission avait atteint maturité et sagesse après toutes ces années.
Quand j’étais jeune, regarder La semaine verte, c’était vraiment agaçant. Mais si j’ose l’analogie agricole, je vous dirais qu’au fil du temps, c’est comme si mon cerveau était devenu un terreau fertile et que, chaque dimanche, l’émission venait y semer de nouvelles notions. Aujourd’hui, avec les années, j’ai récolté un grand champ de connaissances, et tout le monde devrait s’obliger une fois de temps en temps à faire le plein de Semaine verte.
Bon jubilé à toute la grande famille de cette grande émission!
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